EuroFabrique est une expérience unique. C’est un projet, un concept, créé par l’ANdÉA (Association nationale des écoles supérieures d’art et design publiques) qui a existé pour la première fois dans le cadre de la Présidence Française du Conseil de l’Union européenne. C’est en février 2022, au Grand Palais éphémère à Paris, que 400 étudiantes et étudiants d’écoles d’art européennes se sont retrouvés pour créer, échanger, questionner les valeurs, les problèmes et les débats de l’Europe d’aujourd’hui. Cet événement, et en particulier le processus d’être ensemble, a été un tel succès pour les participants, un tel souvenir, que l’ANdÉA a souhaité prolonger l’expérience, transformer EuroFabrique en réseau, en workshop, en aventure itinérante, peut-être même en biennale ? Une deuxième édition a eu lieu à Cluj (Roumanie, 2023, 170 étudiants), c’est alors que la question de l’identité visuelle d’EuroFabrique s’est posée. Pérenniser EuroFabrique, c’est aussi stabiliser une identité nécessairement mouvante. Ainsi, grâce à l’organisation du Signe (CNG, Chaumont), 42 étudiants et 4 enseignants ont passé une semaine ensemble pour créer l’identité visuelle avec un cahier des charges réduit au strict minimum [un nom, un esprit (le processus est plus important que le résultat) et un désir de boîte à outils] et l’absence de chef qui validera ou non l’identité visuelle.
Cette formule très expérimentale nous a procuré à tous une grande joie. Un vrai vertige aussi. L’extase du gouffre… La semaine a commencé par deux conférences exceptionnelles d’Erik de Vlaam (Studio Dumbar) et Richard Niessen. Petit à petit, les étudiants se sont mélangés, la fraternité a été naturelle, l’écoute et la curiosité toujours là. Il fallait être à la fois très préparés mentalement pour ne pas perdre de temps, proposer des pistes d’organisation, et aussi très à l’écoute, très ouvert, sans plan formaté, pour saisir les bonnes idées et laisser choisir les étudiants. Il faut beaucoup d’expérience pour oser glisser à ce point. Le Signe a été extraordinaire, l’organisation et le lieu ont fait écrin. C’était une chance joyeuse d’animer ces cinq jours, d’accompagner ces étudiants, de penser et discuter sans relâche, de se confronter à la question du choix sans chef, de réinventer une démocratie éphémère, et de se laisser faire. Nos points du matin, les sourires et les visages concentrés me manquent. Un grand merci à tous pour leur confiance folle.
La boîte à outil a été livrée en mars 2024 et l’équipe de Ceirveira au Portugal est la première à y puiser des trésors.
Crédits photos : Lili Romanet et Laurent Teisseire